Entretien avec Éric Baret - Jean Bouchard d'Orval - Maison Raphaël - Paris, le 14 mai 1998
2ème partie : Il n'y a que la pensée
Vous n'avez pas d'autonomie
Selon ce que vous avez mangé, ce que vous avez lu, ce que vous croyez, vous répondez d'une manière ou d'une autre. Mais la vie n'est que ça. Vous n'avez aucune liberté dans ce que vous pensez : c'est ce que vous avez lu, entendu, approuvé. Et vous dites " je pense ça ". Vous n'avez aucune liberté dans ce que vous ressentez. Si on voit votre passé, on voit pourquoi vous vous sentez comme ça. Alors s'imaginer qu'un organisme qui n'est que conditionnements peut être libre, c'est une forme de stupidité. Mais à un moment donné, on s'émerveille de cette stupidité, parce qu'elle est notre porte sur la liberté, quand on accepte totalement, quand on se rend compte de notre totale incompétence à pouvoir être libre. Car tout ce qu'on va faire pour être libre, c'est le passé, c'est la mémoire. On peut uniquement trouver le passé, ce qu'on connaît déjà. Si vous pensez sur la liberté, ce sont vos vieux mécanismes, vous ne pouvez que trouver le passé. Quand vous vous rendez compte que ce que vous cherchez vous ne pouvez jamais le trouver, parce que vous allez constamment le projeter, vous réalisez que ce que vous avez toujours cherché devant vous c'est derrière vous et que ça, vous ne le cherchez pas ; c'est ça qui vous cherche, quand vous arrêtez d'avoir la prétention de vouloir le trouver.
C'est que Eckhart appelle l'humilité
Mais il n'y a personne d'humble dans l'humilité. Ça, il faut le comprendre et ensuite il faut oublier qu'on a compris. Se rendre compte combien dans la journée on essaie de se changer, alors que tous nos antagonismes, toutes les peurs, toutes les restrictions en nous, c'est exactement ce dont on a besoin pour découvrir cette liberté. Mais constamment on dit non : " J'ai peur, je voudrais être sans peur. Alors je vais travailler pour être sans peur et peut-être à ce moment-là je vais devenir libre. Je suis jaloux, je dois me libérer de la jalousie pour être libre. Je suis coléreux, je suis ceci, ceci, ceci… " C'est la même chose, c'est une prétention. Non. Vous êtes jaloux, vous êtes peureux, vous êtes agité : c'est la merveille de la vie. Quand vous l'accueillez complètement, que vous vous émerveillez de votre totale stupidité, de votre totale incapacité à comprendre le neuf - parce que vous ne pouvez que comprendre votre mémoire - là il y a une tranquillité qui s'installe. Ça, je dirais c'est un moment de repos ; il faut se laisser inviter, constamment. À un moment donné, il n'y a plus aucune tendance en vous de vous trouver dans quelque chose : de vous trouver dans votre famille, vos enfants, votre travail, votre corps, dans ce que vous faites, ou dans la fantaisie d'être libre. Vous cherchez d'abord dans l'école de danse et puis dans le mari, puis dans les enfants, puis dans la méditation. Mais vous vous cherchez toujours ! À un moment donné, vous ne vous cherchez plus. Ça vous cherche… Vous devenez disponible.
Ce qui s'approche le plus de cette orientation, c'est l'art. Quand vous apprenez à écouter la musique indienne, à regarder la danse, à contempler l'architecture, je dirais que organiquement vous êtes ramené à ce non-dynamisme. Ça c'est ce qu'on appelle en Orient la voie directe. ce n'est pas une voie et personne ne l'a jamais suivie. Il n'y a surtout personne qui soit jamais arrivé au bout ! C'est pour cela qu'on l'appelle la voie directe.
Ça ne remet pas en question quoi que ce soit. Vous pouvez organiquement faire une thérapie, faire du yoga, devenir bouddhiste, vous marier, avoir des enfants, méditer, aller en Inde. Mais à un moment donné, vous ne le faites plus pour quelque chose. Vous faites de la musique parce que vous êtes musicien, pas pour vous trouver dans la musique. La vie c'est l'activité, mais vouloir vous trouver dans l'activité, ça vous empêche d'avoir une activité organique. Si vous voulez vous trouver dans la danse, vous n'êtes jamais un bon danseur. Si vous voulez vous trouver dans la famille, vous n'êtes jamais une bonne mère de famille. Si vous voulez vous trouver dans la méditation, il n'y aura jamais de méditation. La méditation vous trouve, la famille vous trouve, la danse vous trouve, la vie vous trouve. Ça c'est autre chose ; vous suivez. Il y a résonance en vous. Vous ne le faites pas pour ceci ; vous le faites parce que vous le faites. Parce que la raison est humaine et vouloir comprendre quelque chose de ce qui est au-delà de ce qui est humain, c'est un manque de compréhension. Il n'y a rien qu'on puisse comprendre : on ne peut comprendre le soleil, la lune, la vie, la mort, une fourmi, on ne peut rien comprendre ! On peut uniquement ramener à sa mémoire ce quelque chose qui est la totalité. Alors vous respectez ce que vous ne pouvez jamais comprendre. Vous allez voir que c'est vous-même, parce qu'il n'y a rien qui soit à l'extérieur.
Tout ce que vous rencontrez dans la vie, c'est pas autre chose que vous et c'est exactement ce dont vous avez besoin pour vous rendre compte de ça. Alors il n'y a plus de voies spirituelles. Il n'y a qu'une voie spirituelle et vous ne pouvez pas être là en même temps : tant que vous suivez une démarche spirituelle, il n'y a pas de démarche spirituelle : vous la suivez pour vous trouver. Une voie spirituelle n'a pas de place pour un quelqu'un, pour une personne. Dans un moment de tranquillité, où vous ne voulez rien, vous ne savez rien, vous ne prétendez rien, il y a une voie spirituelle. Peut-être irez-vous au Kailash, peut-être irez-vous à la Mecque, mais vous irez pour remercier, pas pour trouver quelque chose. c'est là que l'art se présente. L'artiste joue pour célébrer, pas pour se trouver. Sinon, ce n'est pas un véritable artiste. Alors la démarche spirituelle, du point de vue de l'Orient, c'est un remerciement : c'est remercier du pressentiment d'être. Ce n'est pas un moyen pour se trouver, car ça c'est une caricature. Alors votre vie, votre pensée, votre activité, expriment votre conviction qu'il n'y a rien à trouver dans la vie, qu'il n'y a pas de but à la vie, que chaque instant est sa propre beauté. C'est ça la voie spirituelle. C'est de dire merci : pas à quelqu'un, pas à quelque chose, mais merci à soi-même, parce qu'il n'y a rien d'autre dans tout ce que vous voyez.
Vous ne devez pas écouter
C'est vous qui êtes ce qui est écouté. Il y a écoute. Vous n'écoutez pas. Si vous écoutez, il n'y a pas écoute, il y a agitation. Si vous méditez, il n'y a pas de méditation ; il y a un méditant. Personne n'écoute. Un bruit, une sensation : ça jaillit, ça disparaît. Vous apparaissez, vous disparaissez. Vous n'écoutez jamais, vous ne méditez jamais. C'est ça l'écoute. C'est ça qui est là, maintenant. Le reste, ça s'en va. Quand on est un en votre présence, cette écoute résonne. Qu'est-ce qui peut faire, une fois qu'on est en un autre lieu, dans une autre situation, que ça se maintienne ? Quand vous êtes là en votre présence, cette écoute résonne. C'est un processus, c'est une conscience qui est ma réalité ?
Il n'y a rien d'autre. Sauf dans votre histoire que la réalité devrait être comme un éléphant rose. Il n'y a rien d'autre ! Il n'y a que résonance. Vous l'attribuez à ceci, à cela, mais c'est vous qui vivez la résonance. Il n'y a rien d'autre. Vous vous écoutez maintenant, vous sentez la résonance. Ça c'est vous-même, vous l'avez toujours là. C'est quand vous arrêtez de prétendre qu'elle dépend de quoi que ce soit, y compris de vous-même. C'est sur un fil de rasoir. Un millième de millimètre en avant et c'est parti. Mais c'est toujours là… sauf quand vous voulez l'attraper. Parce que là vous vous êtes quitté, vous avez quitté votre intégrité.
- Mais toute personne qui a un plaisir, un bonheur quelconque, a envie de le retenir…
- Il faut rester avec vous, il n'y a que vous. Vous sentez cette avidité, c'est merveilleux ! C'est votre ishta devata, c'est votre porte sur la tranquillité. Cette avidité, ce n'est pas une erreur à rectifier, qui vous empêche. Non ! C'est ça, c'est ici, il n'y a que ça ! Ouvrez-vous à cette avidité, c'est votre cadeau. Mais vous le refusez, parce que vous dites : " je suis avide, ça m'empêche ". Vous êtes avide : c'est ça qui vous amène ici, c'est ça votre porte de sortie. Il faut l'aimer, c'est vous-même. Qu'est-ce qui se passe quand vous aimez cette avidité ?
On ne peut être clair que maintenant
Alors, constamment on dit non. Je ne devrais pas être avide, parce que la spiritualité, la sagesse, c'est de ne pas être avide. On passe sa vie à refuser ce qui nous amène sur l'essentiel, parce qu'on a l'idéologie que la sagesse, elle est là-bas. Non, elle est maintenant : c'est l'avidité. Vous le ressentez, vous êtes ça. Il n'y a pas de but là-dedans ; le fait d'être est son propre but, sa propre joie. Ça ne vous apporte rien. Vous ne devenez pas riche pour ça, vous ne devenez pas sage pour ça ; vous ne devenez rien. Il n'y a rien d'autre, sinon c'est une histoire. Et c'est dans l'instant, c'est que dans l'instant. Ce n'est pas dans l'histoire de devenir clair et de rester clair jusqu'à la fin de sa vie : ça c'est une histoire.
On ne peut être clair que maintenant. Demain, la peur surgit, c'est merveilleux ! La peur, c'est l'essentiel. Il n'y a que ça. On est constamment en train de dire : " non ! c'est pas ça ! " Un jour vous travaillez plus et puis un jour vous… non, ce n'est pas ça. C'est une histoire. Mais en même temps c'est ce qui vous amène. Comment savez-vous que vous êtes avide ? Vous êtes avide ! C'est la réalité, c'est la tranquillité. Il n'y a rien à faire. Tout ce que vous pouvez faire, c'est à côté. Il n'y a rien à penser, il n'y a pas de technique. Vous ne pouvez pas le faire demain. Vous n'êtes que ça.
- La pensée n'a presque pas de rôle, dans une (…)
- La pensée intentionnelle. Mais il n'y a que la pensée. Il n'y a rien d'autre.
- S'il n'y a pas d'histoire, où est la pensée ?
- C'est encore un dynamisme, même l'absence d'histoire. C'est une double absence : l'absence de l'absence. L'absence d'histoire, pour moi c'est un peu comme le samadhi : il y l'absence d'objet, mais il y a encore l'écho d'une histoire. L'absence de l'absence, c'est ouvert à l'absence de l'histoire et à la présence de l'histoire. Même quand l'histoire est présente, il n'y a pas d'histoire. Parce qu'il n'y a jamais eu d'histoire. C'est nous qui le qualifions d'histoire, c'est nous qui le qualifions de faux, c'est nous qui le qualifions d'illusion, c'est nous qui le qualifions d'avidité. Alors qu'il n'y a que l'essentiel, c'est nous qui le nommons Dieu ou qui l'appelons le diable. Mais pour s'ouvrir à ce pressentiment, la pensée n'a pas de place, sauf quand elle est là. Quand elle est là, c'est ça la porte. C'est-à-dire tout le temps. Elle a pas de place comme moyen, mais elle n'est que résonance.
Il n'y a que pensée
La chaise, c'est une pensée, bien sûr. Ce que vous appelez tabouret, ou arbre, c'est une pensée, bien sûr. Quand vous ne le pensez pas, ce n'est pas là. Je pense que pédagogiquement la sensation - qui est une pensée aussi, qui est toujours en termes d'essence - est beaucoup plus… - c'est très dangereux de dire ça, mais si on le dit très vite… - elle est beaucoup plus proche de l'essentiel que la pensée. S'il y a des gens intelligents dans la salle, bien sûr, ils peuvent détruire cela très facilement. Mais sur un certain plan c'est vrai. Le ressenti de la peur, dans le ventre, est plus proche de l'essentiel que la pensée de la peur. Sur un autre plan, c'est deux pensées. Nous pouvons déceler en nous le mécanisme de la pensée. C'est de vouloir s'en sortir : dès qu'un événement ne correspond pas à notre plan du monde, on pense. Il faut s'en rendre compte. On en peut pas penser et écouter à la fois. Quand on écoute, il n'y a pas de pensée. Il peut y avoir une pensée, mais ce n'est plus une pensée séparée. C'est un écho, une résonance. Quand on ajourne, il n'y a que pensée : " Je devrai, demain. J'aurais dû. Si la situation était différente. Si j'étais différent. " Et ça passe. Vous devenez trop fainéant pour prétendre avoir un quelconque avenir là-dedans, pour vouloir vous trouver dans quelque chose, dans vous-même.
- J'ai exactement les mêmes peurs que vous !
- Et comment vous les vivez ?
- Exactement comme vous !
- Très bien !
Il y a un ressenti. Être sans peur, c'est une histoire. C'est un sage qui est sans peur. Quelqu'un qui est devenu sage et qui est condamné à le rester. Mais si vous ne devenez rien, si vous arrêtez d'avoir la prétention de devenir quoi que ce soit, quelle pourrait être le problème de la peur ? Si vous n'avez pas d'histoire, vous devez être sans peur… Mais dans le seul instant où vous vous libérez de la prétention de devoir être sans peur, comment vivez-vous la peur ? On doit vivre la peur sans peur. On doit vivre la tristesse sans tristesse. On doit vivre l'agitation sans agitation.
Mais quand vous dites vivre la peur sans peur, vivre la tristesse sans tristesse, ce que nous entendons, c'est que c'est possible de traverser ça dans une relative base de confiance. Il faut d'abord qu'il y ait un terrain solide pour pouvoir traverser ça. S'il n'y a pas de terrain solide, il n'y a pas de traversée possible. Si vous avez une histoire de devenir, oui ! Mais à un moment donné, vous ne vous situez pas dans une histoire de devenir sans peur. Alors il n'y a plus de terrain possible. Votre terrain, c'est votre liberté du terrain. Votre peur, c'est votre liberté de la peur. La peur est uniquement là pour que vous vous sentiez sans peur. Mais c'est uniquement possible quand vous dites merci. La peur est uniquement là pour que vous vous sentiez sans peur. Vous sentez la peur : c'est votre cadeau. Vous dites merci. C'est pas un hasard, ce n'est pas une erreur, une erreur divine… Non, c'est votre cadeau. Quand vous n'avez pas l'arrogance d'être sans peur, quand la peur s'immisce totalement en vous, sans la moindre résistance, vous sentez la peur sans peur. Et c'est dans l'instant !
- Qu'est-ce qui peut faire qu'on s'ouvre à la peur, sans la moindre… [inaudible]…, sans la peur de mourir ? Qu'est-ce qui va faire qu'on va dire : " Oui, j'ai peur de mourir et je vais me laisser aller complètement dans cette peur, jusqu'à ce que j'en meure, si ça doit se produire ?
La même chose qui va faire que vous allez commander deux œufs au restaurant tout à l'heure.
- Ça me fait moins peur !
Il n'y a rien de séparé dans la vie, rien qui pourrait avoir une autonomie, une activité, qui pourrait arriver à quelque chose. Vous seriez le seul être indépendant du cosmos, le seul qui pourrait décider quelque chose, de faire ou de pas faire, pour être ouvert à la peur. Parce qu'il n'y a qu'un. Vous pouvez prétendre faire, vous pouvez prétendre ne pas faire, mais vous n'avez jamais rien fait et vous ne ferez jamais rien. Il y a une légèreté quand on comprend ça. Vous ne portez plus sur vos épaules vos capacités. Il n'y a pas de devenir ! Vous sentez la peur, vous dites merci. C'est tout ! Quand vous dites merci, de quoi pourriez-vous avoir peur ? Il faudrait que ce merci me vienne ! Si vraiment j'ai peur, c'est la peur qui va m'emporter et qui va m'effrayer. Ce merci, je vais être obligé de le plaquer, ça va pas être quelque chose de naturel. C'est parce que vous amenez les choses dans une histoire d'un devenir. Le merci, vous ne pouvez pas le dire tout à l'heure, c'est maintenant à tout jamais. N'essayez pas de le trouver dans ce qui va arriver demain ! Ça c'est pas possible.
- Vous voulez dire par là que quand je parle et j'argumente…
Non, avant ça. Vous êtes dans ce merci, mais vous avez l'histoire que vous n'y êtes pas. C'est que vous allez essayer d'y être demain. C'est de ça dont il faut se rendre compte. Donc, peut-être que cette histoire m'habite d'une façon très insidieuse…Ce n'est pas vous ; c'est moi, c'est tout le monde. Il n'y a pas de différence. Oui, d'accord. Oui, oui, d'accord. Mais [rires] pour la plupart des gens ici dans cette pièce, cette histoire qui les habite, elle les habite de façon suffisamment insidieuse pour que, s'ils ont peur, ça ne leur vienne pas naturellement de dire merci.
Vous allez voir que ça c'est une histoire. C'est une histoire dont vous vous servez pour ne pas dire merci maintenant, pour vous maintenir en vie. Un jour vous allez voir que toutes les histoires dont vous vous servez pour justifier de ne pas dire merci, c'était ce qui était nécessaire pour dire merci aussi. Mais dans le moment, toute justification (quand, comment, pourquoi), c'est une fuite. C'est la peur. Vous donnez du L.S.D. à quelqu'un qui vit dans la peur, il va vouloir savoir où il est, qui il est, où il va, ce qui se passe. Vous donnez du L.S.D. à quelqu'un de tranquille, il y a émerveillement. Parce qu'il ne se cherche pas dans ce qu'il voit, dans ce qu'il ressent maintenant.
- C'est un abandon total.
- Même pas ! C'est déjà une histoire. Parce que c'est encore quelque chose qui pourrait se faire. Il faut vivre ça finalement, de plus en plus, avec cette compréhension que c'est derrière et qu'on ne peut que regarder devant, on ne peut faire que devant. Tout est juste. Mais rien n'est ça ; et tout est ça aussi.
- Chez vous c'est juste, mais chez moi c'est une histoire.
- C'est ça l'histoire ! Il y a l'histoire que quelqu'un peut être sans histoire, un grand sage…
…une personne assise sur une chaise devant moi…
…ou sur une montagne, ou dans une grotte, ou vous-même demain.
À chaque instant on essaie de penser l'impensable. Il faut se rendre compte que c'est inévitable, qu'on ne peut pas fonctionner autrement que ça. On ne peut pas éviter aussi de se rendre compte, à un moment donné, que c'est impossible. Quand on voit que c'est impossible, là il n'y a plus d'histoire. C'est pour cela qu'on l'appelle la voie négative. On ne peut jamais pointer. On ne peut pointer que vers ce qu'on n'est pas. Et il n'y a rien qu'on n'est pas. Ce qui se présente, c'est ça. Alors c'est pas la peine de se libérer, de se séparer. Tout ce que vous rencontrez, c'est ça, sauf dans votre histoire que ça devrait ressembler à quelque chose d'autre. Mais on le sent, quand on commence à avoir certains moments où on ne se cherche plus. Ce n'est que quelques instants d'abord : vous n'êtes pas en train de faire quelque chose pour quelque chose. Vous vous mariez, vous divorcez. Vous devenez un dictateur. Vous ouvrez un pressing. Mais vous ne vous cherchez pas là-dedans. Qu'est-ce que c'est l'essentiel ! Ça ne peut pas être autre chose, sauf dans l'histoire que les pressings c'est des pressings. Il n'y a jamais eu de pressing. Il n'y a que l'essentiel, si on ne crée pas une histoire, si on ne sépare pas. Il faut se rendre compte soi-même qu'on est toujours en train de séparer : le haut et le bas, oui et non…vous et moi.
A suivre...
Source: notefish.com